L'ambiance était tendue aux abords de l'hôtel Windsor, ce lundi. Manifestants et policiers se sont affrontés, et ces derniers n'ont pas hésité à faire usage de gaz lacrymogènes et de flash-ball à l'encontre des personnes sur place. Protester Marcelo Tigre, shot with rubber bullets in the ear and leg. Photo: Ricardo Moraes/Reuters #Libra #Rio pic.twitter.com/Y8TzudxCRP — Kety Shapazian (@KetyDC) October 21, 2013 La raison de cet emballement est simple : c'est à l'hôtel Windsor que se déroule ce lundi une vente aux enchères complètement inédite et fondamentale pour l'avenir du Brésil. Les réserves brésiliennes multipliées par deux La mise aux enchères porte sur 70% de Libra, ce gisement de pétrole offshore brésilien en eaux profondes, découvert en 2010. Mais Libra n'est pas qu'un simple gisement. Situées dans le bassin de Santos, dans une couche antésalifère, ses réserves totales se chiffreraient entre 8 et 15 millars de barils de pétrole. Ce qui en ferait simplement le plus grand gisement de pétrole découvert depuis celui de Cantarell, au Mexique, en 1976, mais aussi et surtout le premier gisement brésilien. Pour pas faire les choses à moitié, Libra multiplierait par deux les réserves pétrolières du Brésil. ► ► ► A LIRE AUSSI | Un immense gisement de pétrole découvert au large de Sao Paulo et baptisés Carioca Une vente aux enchères inédite Alors, pourquoi une vente aux enchères ? Car les gisements brésiliens ont un potentiel considérable, mais pour pouvoir les exploiter, il faut une quantité énorme d'investissements (autour de 500 milliards de dollars). C'est pourquoi le Brésil a organisé la vente de 70% de son gisement (30% sont déjà réservés à Petrobras, la compagnie nationale). Onze compagnies pétrolières participent aux enchères, qui se tiendront à 14h heure brésilienne (18h en France). Petrobras, contrôlée par l'Etat brésilien, sera bien évidemment présente, mais y figurent également des groupes chinois, néerlandais, colombien... et français, car Total sera présent. Par contre, aucun groupe américain n'a souhaité participer. Un consortium de cinq groupes Le groupe pétrolier français est l'un des favoris, puisque c'est sans doute vers un consortium que se dirige la vente aux enchères. On parle d'un partenariat entre Total et Petrobras, deux groupes chinois CNPC (China National Corporation) et CNOOC (China National Offshore Oil Corporation), et une dernière entreprise dont le nom n'est pas encore connu. En réalité, cette vente aux enchères est à moitié jouée d'avance, puisque c'est celui qui rétrocèdera le plus grand pourcentage de pétrole à l'Etat brésilien qui devrait l'emporter. D'autant que la compagnie nationale Petrobras détient obligatoirement 30% du gisement. Or, les entreprises chinoises devraient, proposer de procéder 50%. Les syndicats mobilisés contre la vente Les syndicats pétroliers brésiliens sont montés au créneau pour contester la vente. Ils dénoncent ce qu'ils nomment la plus grande privatisation de l'histoire des ressources du pays, et ont donc entamé une "grève illimitée", jeudi 17 octobre. La Fédération unique des travailleurs du pétrole (FUP), leader du mouvement, réclame la suspension immédiate des enchères. Elle dénonce les risques pour la souveraineté et les pertes que la nation brésilienne subira si des compagnies pétrolières multinationales s'approprient Libra. Le gouvernement s'en défend. ► ► ► A LIRE AUSSI | La fin du pétrole n'est pas pour demain "Nous ne sommes pas en train de privatiser le pétrole du pré-salifère, au contraire, nous nous approprions cette richesse immense qui se trouve sous la mer et à l'intérieur de la terre", a déclaré le ministre des Mines et de l'Energie. A l'initiative de l'ex-président Lula, une loi a également été instaurée visant à consacrer la manne pétrolière à l'Education (75%) et à la Santé (15%). 700 militaires mobilisés Rio now: National troops (sent by president Dilma Rousseff to make sure Libra auction goes as planned) using teargas pic.twitter.com/dCTzRMUXUo — Kety Shapazian (@KetyDC) October 21, 2013 Dès 11 h locales, un groupe de 200 manifestants, dont certains masqués, a tenté de forcer un barrage policier près de l'hôtel avant d'être repoussé par les forces de l'ordre, qui ont fait usage de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc. Pour l'occasion, Dilma Roussef avait envoyé 700 militaires et plusieurs centaines de policiers devant l'hôtel de luxe Windsor pour sécuriser la vente aux enchères. |